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Nouvelle investigation: Seulement 17% du financement mondial pour le climat et la conservation destiné aux peuples autochtones et aux communautés locales leur parvient réellement, ce qui limite l’efficacité et l’inclusion des fonds
L'INITIATIVE DES DROITS ET RESSOURCES & Rainforest Foundation Norway

Les objectifs internationaux en matière de changement climatique et de déforestation sont en danger malgré les 1,7 milliards de dollars promis lors de la CdP26 à Glasgow.

22 .09. 2022  
7 minutes read
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WASHINGTON DC (le 14 septembre 2022) — Des 270 millions de dollars de financement pour la conservation qui s’investissent annuellement dans les initiatives de possessions et de gestion forestière des peuples autochtone et des communautés locales (PA et CL) — qui est seulement une petite fraction du financement total dédié à aborder le changement climatique — seulement 17 % est destiné à des activités qui nomment spécifiquement une organisation autochtones, selon « Le financement à des fins précises« , un nouveau rapport publié aujourd’hui par Rainforest Foundation Norway et L’Initiative des droits et ressources.

Ce chiffre surestime certainement la proportion réelle qui parvient à ces communautés, étant donné que les coûts d’exécution des projets — prélevés par les intermédiaires — font aussi partie de ce financement. La divergence remet également en question la part des 1,7 milliard de dollars promis aux PA et CL pour leurs initiatives en matière de régimen foncier et de conservation lors des réunions de l’ONU sur le changement climatique qui leur parviendra réellement.

“En Amazonie, nous luttons constamment contre les politiques anti-autochtones qui prétendent abattre et substituer les forêts qui nous donnent une vie physique et culturelle,” a dit Rose Meire, directrice adjointe du Fond Podáali et membre du village Apuriña de la région de Purus, en Amazonie brésilienne. “Si la communauté internationale estime nos forêts et comprend que les peuples autochtones servent à l’humanité en préservant et en luttant contre la destruction de notre planète, elle doit les soutenir plus efficacement et nous procurer un financement direct à travers nos propres mécanismes. Notre lutte est pour toutes nos vies, et ce soutien renforce cette lutte.”

“Pour le monde extérieur, les gens voient les forêts du bassin du Congo — nos forêts — comme une ressource naturelle d’importance critique,” a indiqué Patrick Saidi, qui dirige la Dynamique des Groupes des Peuples Autochtones (DGPA) de la République Démocratique du Congo (RDC), un réseau de 45 organisations qui travaillent pour garantir les droits des peuples autochtones et améliorer la reconnaissance de leur rôle dans la protection des forêts. “Cependant, trop de gens dans la pratique considèrent que nos forêts s’interposent à leur définition de progrès et de richesse. Nous aimerions recevoir une assistance financière pour nous aider à maintenir nos terres et les merveilleuses ressources naturelles qu’elles contiennent.”

“Les peuples autochtones ont la capacité de gérer directement le financement,” a dit Rukka Sombolinggi, Secrétaire Général de l’Alliance des Peuples Autochtones de l’Archipel (AMAN) et membre autochtone du peuple Torajan de l’île Sulawesi (Indonésie).

“Pendant que nous nous efforçons de protéger et de gérer nos terres face à ceux qui nous excluent et détruisent nos foyers, nous aurions besoin de l’aide financière destinée à ces luttes. Ouvrir le portefeuille et payer quelqu’un d’autre pour la sueur et le sang que nous versons au nom de la conservation te place du mauvais côté de la lutte.”

 

Entre 2011 et 2020, les bailleurs de fonds ont déboursé environ 2,7 milliards de dollars (une moyenne de 270 millions de dollars par an) pour des projets de soutien à la possession des terres de peuples autochtones et de communautés locales et à la gestion forestière dans les pays tropicaux. Dans le nouveau rapport, les chercheurs ont rassemblé des données sur ce flux de financement et ont évalué les subventions selon différentes dimensions des critères « adaptés aux objectifs,” — déterminant si le financement a atteint les objectifs prévus ou si son exécution et efficacité ont été compromises.

Les conclusions du rapport, organisées en fonction des critères “adaptés aux objectifs” pour le financement des peuples autochtones et des communautés locales, sont les suivantes:

  • Financements gérés par les PA et les CL : Seulement 17 pour cent des financements destinés à la tenure et à la gestion forestière des PA et des CL entre 2011 et 2020 mentionnaient une organisation de PA, ce qui indique que la part des fonds gérés par des organisations autochtones est faible.
  • Responsabilité mutuelle : Il y a un manque de reddition de comptes et de transparence de la part des bailleurs de fonds à l’égard des PA et des CL, ce qui limite la mesure dans laquelle les PA et les CL peuvent comprendre et influencer les priorités et les décisions des bailleurs. La plupart des fondations privées, qui représentent la majorité des bailleurs de fonds de la Déclaration conjointe des donateurs pour l’appui aux initiatives visant à garantir, renforcer et protéger les droits des populations autochtones et des communautés locales, ne communiquent pas systématiquement les données relatives à leurs projets.
  • Accord de financement souples et à long terme : Les bailleurs proposent de plus en plus fréquemment des fonds à travers des accords de financement à long terme, ce qui confère aux organisations des PA et des CL une visibilité et une sécurité dont ils ont grand besoin. Cependant, un manque de souplesse pour pouvoir modifier ou adapter les priorités dans le cadre des projets freine les organisations des PA et des CL au moment de répondre à des besoins communautaires divers ou des menaces imminentes, ou encore de profiter de nouvelles possibilités.
  • Financements non discriminatoires en matière de genre : Seulement 32 pour cent des financements destinés à la tenure et à la gestion forestière des PA et des CL englobaient des mots clés liés au genre, malgré le rôle essentiel joué par les femmes dans la gestion forestière assurée par des PA et des CL, et leur exclusion manifeste de nombreuses structures gouvernementales et des décisions liées à la gestion des forêts.
  • Financements opportuns et accessibles : En raison des exigences administratives et des conditions d’admissibilité strictes imposées par les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux, les organisations des PA et des CL doivent surmonter des obstacles considérables pour accéder aux financements. Ainsi, les financements versés pour la tenure et la gestion forestière des PA et des CL ont généralement été tributaires des structures traditionnelles de financement de l’APD, les organisations nationales et internationales jouant le rôle d’intermédiaires.

“Garantir et protéger les droits fonciers des peuples autochtones et des communautés locales est un des moyens les plus rentables, équitables et efficaces pour protéger, restaurer et utiliser de façon durable les terres forestières tropicales et les écosystèmes qu’ils constituent,” a indiqué Torbjørn Gjefsen, conseiller principal en politiques sur le climat de la Rainforest Foundation Norway.

C’est une solution autant pour la crise du changement climatique que pour celle de la biodiversité auxquelles fait face l’humanité. Nous avons déjà promis le financement pour les soutenir; maintenant nous devons nous assurer qu’ils le reçoivent.”

 

Le nouveau rapport signale que les droits des PA et CL sont inextricablement liés à la préservation des écosystèmes clé et au maintien du carbone entreposé dans les forêts tropicales et les tourbières. Au moins 36 pour cent des zones clés pour la biodiversité dans le monde se trouvent sur les terres des peuples autochtones et des communautés locales, ainsi qu’au moins 25 pour cent du stockage du carbone en surface dans les forêts tropicales.

Les efforts visant à limiter les pires impacts du changement climatique et la perte de biodiversité dépendent du fait que ces paysages demeurent intacts, et la gestion forestière par les PA et les CL s’est avérée plus efficace à cet égard que toute autre. Alors que l’année 2020 a vu le taux de déforestation le plus élevé de l’histoire du Brésil, par exemple, les taux de déforestation étaient jusqu’à trois fois moins élevés dans les territoires autochtones.

Le dernier rapport de l’ONU sur le climat souligne ce point, en affirmant: “Le soutien à l’autodétermination des autochtones, la reconnaissance de leurs droits et le soutien à l’adaptation fondée sur les connaissances autochtones est fondamentale pour réduire les risques liés au changement climatique et l’adaptation efficace.”

“Il y a beaucoup de choses qui se mettent en travers du financement des peuples autochtones et des communautés locales, mais en fin de compte, nous ne résoudrons pas la double crise du changement climatique et de l’extinction de la biodiversité si nous ne reconnaissons pas la nécessité d’établir des partenariats plus équitables,” a indiqué Solange Bandiaky-Badji, coordinatrice de L’Initiative des droits et ressources. “Avec les nouveaux mécanismes de financement dédiés au soutien des initiatives menées par les PA et les CL, les bailleurs de fonds ont l’occasion de bien faire les choses et de s’assurer que leurs fonds vont directement aux populations locales qui mènent les efforts sur le terrain.”

 

Lisez le rapport en français, anglais ou espagnol. Et lisez le communiqué de presse en anglais, portugais ou espagnol. Pour toute question, commentaire ou demande d’interview, veuillez envoyer un courriel à Madiha Waris Qureshi.

 

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