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La coalition RRI progresse dans la mise en œuvre du cadre mondial pour la biodiversité dans le bassin du Congo
Michelle Sonkoue, Facilitatrice Afrique chez RRI avec des contributions de Alex Romero, l’Associée Senior Programme Afrique et Patrick Kipalu, Directeur Programme Afrique chez RRI

Pour promouvoir la conservation dans le bassin du Congo en Afrique au-delà des zones protégées établies, CLARIFI met l'accent sur l’émergence d’alternatives à la conservation de forteresse et la sécurisation des tenures forestières et foncières collectives pour stopper l’expansion des menaces qui pèsent sur la biodiversité des forêts.

27 .07. 2024  
8 minutes read
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Dans le cadre de l‘Initiative de financement des droits fonciers et des modes de conservation communautaires (CLARIFI), l’Initiative des droits et ressources (RRI), l’Alliance mondiale des collectivités territoriales (GATC) et la Campagne pour la nature (C4N)—avec une subvention du Bezos Earth Fund—travaillent ensemble afin de renforcer conjointement la reconnaissance des droits fonciers des peuples autochtones, des communautés locales et des peuples afro-descendants dans le bassin du Congo en Afrique et les Andes tropicales en Amérique Latine.

Le projet, lancé en 2021 dans le cadre de l’initiative CLARIFI, est intitulé “Partenariat pour les Peuples, la Nature et le Climat” et vise à renforcer les droits fonciers communautaires et la conservation au niveau local entre 2022 et 2025 afin de faire progresser les objectifs mondiaux en matière de conservation, de climat et de développement dans le bassin du Congo (République démocratique du Congo, République du Congo et Gabon) et les Andes tropicales (Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou).

Des tenures foncières et forestières collectives pour la conservation de la biodiversité

Pour promouvoir la conservation dans le bassin du Congo en Afrique au-delà des zones protégées établies, CLARIFI met l’accent sur l’émergence d’alternatives à la conservation de forteresse et la sécurisation des tenures forestières et foncières collectives pour stopper l’expansion des menaces qui pèsent sur la biodiversité des forêts.

Avec le soutien financier du Bezos Earth Fund, CLARIFI a entrepris des actions concrètes démontrant des alternatives aux approches de conservation qui excluent les communautés. A certains endroits, les interventions du projet ont permis de stopper les actions des entreprises forestières, minières et pétrolières, dont les activités dans les zones forestières auraient accéléré la dégradation des terres et des sols ainsi que les moyens de subsistance des communautés qui en dépendent.

Les communautés contribuent depuis des millénaires a la conservation des écosystèmes forestiers et la biodiversité par leurs connaissances et pratiques traditionnelles. Dans le bassin du Congo, le Partenariat vise à renforcer la reconnaissance des droits fonciers et forestiers collectifs des peuples autochtones, des communautés locales et des femmes au sein de ces communautés par la sécurisation des droits fonciers collectifs des communautés sur 3 000 000 hectares de terres dans les trois pays cibles. Cela accompagne les objectifs globaux de protection de 30% de la nature d’ici 2030, en respectant les droits de tenures de plus de 126 millions de personnes qui y vivent depuis plus de 50 000 années.

En particulier, les forêts d’Afrique centrale et du bassin du Congo sont stratégiques pour les efforts globaux de réduction des émissions des gaz à effet de serre et de stockage du carbone. On estime que ces écosystèmes stockent près de 40 Gt de carbone. À tire d’exemple, les données recueillies dans le cadre de ce projet dans la zone de Massaha au Gabon montrent une biomasse importante (en moyenne 378,40Mg à l’hectare soit une capacité de stockage de carbone de 172,55Mg C/ha), ainsi qu’une diversité faunique significative, malgré l’absence d’aires protégées formelles.

Image réelle prise dans la zone de Massaha au Gabon où l’on pensait auparavant que les léopards n’existaient plus. Credit : Nsombou Abalghe-Dzal Association (NADA).

Depuis le lancement des activités en 2022, 39 projets sont mis en œuvre par des organisations dirigées par des peuples autochtones et des communautés locales en République démocratique du Congo (RDC), en République du Congo et au Gabon. À mi-parcours, le projet a déjà contribué à sécuriser les droits fonciers collectifs des communautés et de promouvoir la conservation communautaire dans ces trois pays grâce à diverses mesures telles que la cartographie participative, la foresterie communautaire, la conservation des aires et patrimoines des communautés, et les accords locaux sur les terres.

Ces actions ont considérablement réduit les menaces de déforestation sur plus 1 100 000 hectares de terres forestières, souvent convoitées par des industries minières, forestières et agro-industrielles et ont contribué à la conservation de la biodiversité. A titre d’exemple :

Par exemple, à BOMBWANZA, en RDC, grâce à l’appui du Partenariat au travers de l’association dénommée la Ligue Nationale des Associations Autochtones Pygmées au Congo (LINAPYCO), les droits fonciers des peuples autochtones ont été sécurisés sur 100 000 hectares. Ceci a permis de protéger 14 villages sur 15 faisant partie de la zone sécurisée contre l’exploitation forestière industrielle illégale et d’autres formes de conversion des forêts.

De plus, l’inclusion des femmes, souvent marginalisées par certaines pratiques coutumières dans ces processus de sécurisation collective, a renforcé leur pouvoir dans la gestion des terres, favorisant ainsi l’adoption ou le renforcement de pratiques durables telles que l’agroforesterie et la restauration des paysages ainsi que la lutte contre les changements climatiques et plus globalement en améliorant la résilience des communautés.

Quelques impacts clés

En matière de gouvernance sensible liée au genre : L’inclusion des femmes dans les processus de sécurisation collective des terres et forêts a permis de renforcer les moyens de subsistance en RDC et RoC notamment par la structuration des chaines de valeurs pour les cultures telles que le manioc, le plantain et le maïs, et le recyclage des déchets plastiques.

En matière de conservation : Les enquêtes de terrain, les festivals culturels et spirituels, le plaidoyer, le dialogue sur l’aménagement du territoire et les techniques de résolution des conflits ont tous contribué à promouvoir d’autres mesures de conservation efficaces par zones.

  • En RDC, à l’issue de l’atelier tenu à Kinshasa du 24 au 26 avril 2024, le gouvernement s’est engagé à lancer le processus d’élaboration d’une stratégie nationale de conservation de la nature en dehors des aires protégées. Cette innovation renforce la position de chef de file de la RDC en faveur des reformes inclusives et de la conservation basée sur les droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne les droits aux terres des peuples autochtones et des communautés locales.
  • Au Gabon, la zone de Massaha, autrefois le théâtre de tensions et de destruction de la biodiversité, a été préservée grâce à l’arrêt de l’exploitation forestière, contribuant ainsi à réduire les menaces sur la forêt. Plus de 400 000 hectares de terres forestières ont ainsi été préservés au Gabon depuis 2023.
  • En RoC, une organisation autochtone a été appelée d’urgence par le ministère en charge de la gestion foncière pour cartographier et sécuriser plus de 250 000 hectares de terres forestières dans les départements de la Likouala et de la Sangha. Cette initiative, visant à créer une zone communautaire collective, contribuera à la conservation de l’immense biodiversité de ce territoire—qui comprend des éléphants, des gorilles, des singes, des oiseaux, des crocodiles et une grande quantité de poissons—qui ont été préservée par les communautés grâce à leur mode de vie, leurs rites et l’utilisation traditionnelle des ressources naturelles.

En matière de droits communautaires et de droits de l’homme : Entre 2022 et 2024, la combinaison de diverses approches de sécurisation foncière a permis d’augmenter de 1 100 000 hectares les terres reconnues comme appartenant aux peuples autochtones et aux communautés locales. Elle a également permis de protéger des milliers de personnes contre les expulsions forcées en absence de consentement libre, informé et préalable (CLIP) et de compensation juste et adéquate dans le bassin du Congo.

En matière d’accès direct des peuples autochtones et communautés locales aux financements : Le Partenariat promeut la dynamique de renforcement des capacités par la pratique et l’auto-détermination des communautés. Sur l’ensemble des projets de la coalition RRI en cours dans les pays d’Afrique Francophone, 40% sont mis en œuvre par des organisations n’ayant jamais reçu des financements internationaux avant le début de ce projet.

Conclusion et modalités de mise à l’échelle

Le chemin pour consolider la conservation de la biodiversité par la sécurisation collective des territoires dans le bassin du Congo est encore long : la mise à échelle des actions menées en RDC, RoC et au Gabon, incluant dans les autres pays du bassin du Congo, est urgent pour sauvegarder cet écosystème interdépendant.

L’élaboration et la mise en œuvre de plans simples de gestion des forêts communautaires ; l’aménagement du territoire ; la restauration des zones dégradées ; la réduction des conflits armés et liés à la transhumance transfrontalière ; et l’aboutissement des processus de plaidoyer ciblant les réformes des politiques pour la gouvernance des terres et des forêts sont des pistes à approfondir pour accélérer l’impact de ce Partenariat dans le bassin du Congo.


Les organisations chargées de la mise en œuvre sont les suivantes : Bureau communautaire pour l’environnement, l’agriculture et le développement durable (BCEAD), Congo Watch, Dynamiques des Groupes des Peuples Autochtones (DGPA), Centre des Technologies Innovatrices et de Développement Durable (CTIDD), Association des Femmes Autochtones Pygmées (AFPA), Association des Femmes Autochtones Pygmées (AFAF), Organisation Congolaise des Ecologistes et Amis de la Nature (OCEAN) , Brainforest-Keva Initiative-Minorités Autochtones et Pygmées du Gabon (MINAPYGA), Association pour le Développement Durable des Populations Autochtones et Communautés Locales du Gabon (ADDPALG) , Nsombou Abalghe-Dzal Association (NADA), Action Communautaire des Femmes Autochtones du Congo (ACFAC), (Association pour le Respect du Droit des Populations Autochtones, du Développement Durable et du Droit de l’Homme) ARPA2DH, Cercle des droits de l’homme et de développement (CDHD), Association Bomassa pour Promouvoir la Culture et Protéger la Biodiversité (ABPCPB), Réseau National des Populations Autochtones du Congo (RENAPAC CONGO), Coalition des Femmes Leaders pour l’Environnement et le Développement Durable (CFLEDD), Ligue Nationale des AssociAssociations Autochtones Pygmees au Congo (LINAPYCO), Congolese Resources Institute (CRI) and Programme Intégré pour le Développement du Peuple Pygmée (PIDP).

Pour tout commentaire ou question, n’hésitez pas à contacter Alex Romero ou Michelle Sonkoue par courrier électronique. Photo de couverture : Participants à un atelier de formation de la communauté de Massaha sur les aspects juridiques de la conservation communautaire. Province de l’Ogooué Ivindo, Gabon. Credit : Nsombou Abalghe-Dzal Association (NADA).

 

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